Une réservation particulière chez Uber
Christian Lair, retraité de 67 ans et Vice-Président de l’ANM’ Chiens Guides, est maître de Moti, chien guide croisé Labrador-Golden retriever, depuis 2018. Au-delà des difficultés d’accès, il témoigne pour nous d’une belle rencontre…
Bonjour, je voudrais vous raconter aujourd’hui une petite histoire qui m’est arrivée récemment.
Ce soir-là, je rentrais de Paris avec mon chien. Il était 21 heures et, après 5 heures 30 de TGV, nous n’avions qu’une idée en tête : rentrer le plus rapidement possible à la maison. Les bus se faisant rares à cette heure tardive, je pris la décision de faire appel à un VTC. Je sortis donc mon téléphone et, à partir de l’application Uber, je commandai ma course.
Immédiatement les coordonnées d’un chauffeur s’affichèrent ; il était annoncé pour une prise en charge dans les quatre minutes. Comme à mon habitude, je fis une copie d’écran et lui adressai un message pour lui préciser ma position exacte et le fait que j’étais accompagné d’un chien guide. Par avance, je le remerciai également de bien vouloir venir à ma rencontre lorsqu’il serait là car je ne le verrais pas arriver. A peine le message fut-il envoyé que la course disparut de l’écran. Manifestement, la présence de mon chien l’avait dissuadé de prendre cette course. Très énervé par cette attitude, je me félicitai cependant d’avoir fait une copie d’écran qui, par la suite, me permettrait de faire une réclamation circonstanciée auprès de la société Uber.
Dans les secondes qui suivirent, les coordonnées d’un nouveau chauffeur s’affichèrent à l’écran. Je m’empressai d’appliquer la même procédure que précédemment : copie d’écran, message au chauffeur. La prise en charge était annoncée dans les trois minutes et, contre toute attente, je reçus une réponse : « Pas de problème, je suis sourd et muet ». Ce message me laissa bien perplexe : s’agissait-il d’une plaisanterie ? le chauffeur allait-il disparaître comme le précédent ?
Quelques instants plus tard, je fus sorti de mes réflexions par un léger tapotement sur l’épaule droite. Une main glissa jusqu’à mon avant-bras, et je fus conduit devant une voiture. La portière s’ouvrit et, après installation sur la banquette arrière et le chien à mes pieds, je l’entendis se refermer. Le chauffeur s’installa devant et la voiture démarra. Les rues empruntées me confirmèrent que nous étions sur le bon chemin.
J’ai pour habitude de demander l’arrêt deux ou trois cents mètres avant la destination finale : cela permet à Moti de se dégourdir les pattes et de faire ses besoins avant d’arriver à la maison. Une question vint immédiatement à mon esprit : comment allais-je faire comprendre cela au chauffeur ? la voiture contourna le dernier rond-point avant l’entrée de ma rue : il fallait se décider rapidement. A mon tour, je tapotai donc l’épaule droite du chauffeur et, d’un geste confus de la main, je signifiai que je voulais descendre. Ma demande fut immédiatement comprise. La voiture s’arrêta. La portière arrière s’ouvrit et, après avoir récupéré mes affaires et mon chien, je me trouvai face au chauffeur. Pour manifester mon contentement, j’agitai vivement mon poing serré avec un pouce dressé. Sans aucun doute, le chauffeur comprit ma satisfaction et me tapota à nouveau sur l’épaule droite. Moti s’avança vers lui et reçut vraisemblablement une caresse. Le chauffeur remonta dans sa voiture et reprit la route.
Cette petite histoire qui peut paraître bien banale reste gravée dans ma mémoire. Elle me fait réfléchir sur deux mots : l’indifférence et la différence. Je suis convaincu que, si l’on parvient à se débarrasser de l’indifférence, la différence n’est plus un problème.